Un rude hiver (Pléiade) by Raymond Queneau

Un rude hiver (Pléiade) by Raymond Queneau

Auteur:Raymond Queneau [Queneau, Raymond]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


IV

Bernard empocha le Balzac, la sonnette fit ding et il fut dehors, dans le brouillard et dans la nuit. Au lieu de remonter vers la rue Thiers, et au-delà, vers sa maison à mi-côte, il descendit vers le boulevard de Strasbourg et la Bourse, et, au-delà, vers le Bassin du Commerce. Les yôtes blancs dormaient sur l’eau tranquille ; quelques-uns, allemands et séquestrés, pourrissaient abandonnés. Au bout du quai Lamblardie, un trois-mâts norvégien reposait près des bois qu’il avait débarqués. Sur le quai des Casernes, Bernard croisa un groupe de morveux à moitié ivres, de francs bandits de quatorze ans ; ils passèrent sans rien lui dire. Il traversa le pont, prit la rue des Drapiers traversant la pouillerie sordide et vibrante du quartier Notre-Dame, et se retrouva rue de Paris, en pays civilisé. Les magasins étaient déjà fermés, ou leurs lumières obscurcies ; mais une foule, autochtone, militaire ou belge, animait consciencieusement cette voie principale.

Bernard rentra par le tram et trouva son père qui attendait la soupe en rêvant. Le bonsoir ppa-bonsoir fils ne fut suivi d’aucune conversation même incohérente. La mort de François-Joseph ne fut pas commentée non plus que le communiqué du soir que M. Lehameau allait chaque jour voir affiché au Petit Havre. Bernard regardait de temps à autre son père, l’examinait discrètement ; mais son père n’avait pas l’air plus soucieux ni plus préoccupé que les autres jours. Après le dîner, on fit tout de même une partie de jacquet. M. Lehameau gagnait toujours, et son fils n’avait jamais paru s’en offenser. M. Lehameau gagna encore ce soir-là. Après le bonne nuit ppa-bonne nuit fils, il resta seul devant le feu qui s’éteignit passé minuit ; alors il alla se coucher.

Le lendemain, le déjeuner fut à peu près aussi silencieux ; il le fut un peu moins parce que la lecture des journaux excitait toujours Théodore ; lequel disparut après le café. Pour la première fois de sa vie, Bernard restait le dernier à table. Cependant, M. Lehameau, sorti, poursuivait un itinéraire devenu précis, et qui le conduisait toujours près du fort [p. 925, 2e ligne du chapitre III] de Tourneville. [La suite correspond au chapitre III de l’édition originale.]



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